mercredi 21 octobre 2009

ACTUALITE : LA LUTTE DES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS (2)



Alors que les actions des travailleurs sans papiers prennent de l'ampleur (3 000 grévistes dans une quarantaine d'entreprises aux dernières nouvelles), un rassemblement a été organisé vendredi 16 octobre devant le consulat d’Haïti à Paris. La vidéo spongieuse ci-dessus en résume les enjeux, tandis que ce texte détaille le bilan de la rencontre avec le ministre conseiller.

jeudi 15 octobre 2009

ACTUALITE : LA LUTTE DES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS



Depuis l'année dernière, la lutte pour la régularisation des travailleurs sans-papiers s'accélère. Elle semble avoir pris un tournant le samedi 10 octobre, avec une manifestation qui a réuni plus de 10.000 personnes - du jamais vu depuis 1997. Dans la foulée, le lundi 12 octobre, 1.300 travailleurs sans-papiers ont lancé un nouveau mouvement de grève dans 28 entreprises, organisé par la CGT. D'autres actions se préparent, qui seront annoncées, entre autres, sur le site de l'association Droits devant. La première d'entre elles a lieu dès demain, devant le consulat d'Haïti. En attendant, regardez donc la vidéo haute définition ci-dessus, signée l'Eponge. Elle montre des images du cortège de samedi, accompagnées de propos édifiants de sans-papiers qui témoignent de leur vie. A diffuser.

JEU VIDEO : LE GUIDE "200 JEUX VIDEO ESSENTIELS"

Enfin ! Après des mois de dur labeur, le guide « 200 jeux vidéo essentiels », dont je suis le rédacteur en chef, sort aujourd’hui en kiosques et sur notre site. Au programme, une ludothèque idéale constituée de jeux disponibles dans le commerce, sélectionnés par un comité de dix journalistes de la presse écrite, du Web, de la radio et de la télévision.

En bonus : l’histoire du jeu vidéo, un panorama des métiers de la création, des conseils pour choisir sa machine, des rétrospectives sur des sagas de légende, des portraits d’auteurs exceptionnels, les 10 meilleurs titres indépendants, les 10 plus grands jeux en ligne, les 10 hits les plus attendus de 2010, une préface de David Cage, des index par genre et par support ainsi qu’un lexique. En exclusivité, voici un extrait de l’article consacré à la série Metal Gear et à son créateur, Hideo Kojima :
Pendant son enfance, Hideo Kojima a voulu être cosmonaute, policier, détective, artiste, illustrateur, écrivain, réalisateur... Enthousiasmé par Super Mario Bros., il devient game designer. Il entre en 1986 chez Konami où il codirige Penguin Adventure. En 1987, il conçoit Metal Gear. En 1988, il rend hommage au cinéma –son autre passion - dans The Snatcher, un jeu d’aventure cyberpunk fortement influencé par Terminator et Blade Runner. Après Metal Gear 2, il lance Policenauts en 1994, un jeu d’aventure mêlant science-fiction et film noir. Il séduit ensuite un public massif et mondial avec les quatre Metal Gear Solid. Marqué par les récits de son père qui a connu les bombardements sur Tokyo pendant la Seconde Guerre mondiale, Kojima injecte dans cette série son obsession du nucléaire et son pacifisme. Il dirige aujourd'hui Kojima Productions, une filiale de Konami fondée en 2005.

VOYAGE : L'ISLANDE



L'Islande… Jusqu'à présent, le voyage de ma vie. Extraterrestre. Hors de proportion. FOU. C'est le début des temps, ou la fin des temps, ou l'Enfer, ou la Lune, mais ce n'est plus tout à fait notre planète. D'ailleurs, si vous voulez apprendre comment une monstrueuse éruption volcanique a produit une sorte d’apocalypse mondiale il y a deux siècles et contribué à déclencher la Révolution française, lisez donc ce compte-rendu en images, souvent spectaculaires. Pour le reste, la vidéo ci-dessus concentre en cinq minutes les moments forts du voyage. A regarder de préférence en haute résolution et en plein écran.

Choc sensoriel, donc, mais qui n'est pas sans donner matière à réfléchir. En traversant ces paysages à la beauté, à la diversité et aux contrastes insensés, qu'on croirait dessinés par un artiste dément, je n'ai pu m'empêcher de penser aux jeux vidéo et à ce que j'ai recherché à travers eux depuis que je suis petit : un mystère ; un voyage facile dans des lieux irréels qui se dévoilent peu à peu ; une fascination panthéiste pour une nature pastorale, angoissante ou sublime (au sens de Burke). On sait que Shigeru Miyamoto, le créateur de Super Mario et The Legend of Zelda, aspire à transcrire dans ses jeux des sensations précieuses : celles qui l'habitaient quand, enfant, il découvrait des grottes ou d'étroits chemins dans les forêts de sa campagne natale. Et des titres aussi divers que Half-Life 2, Halo, Ico, Shadow of the Colossus, Silent Hill 2, Grand Theft Auto IV, Uncharted : Drake’s Fortune ou Psychonauts façonnent des mondes inoubliables, qui portent les traces d’un long passé, écrasent le joueur sous des perspectives monumentales ou utilisent l'espace comme une métaphore de l'esprit.

Je n'avais pas encore visité un pays capable de me procurer des émotions comparables. Et puis j'ai vu cette immense chaîne de cratères menant à un glacier de la taille de la Corse, ces nuages bas se déchirer en pleine tempête pour révéler le ciel bleu pendant une poignée de secondes, cette nature si hostile que pas un insecte, pas un animal ne peuvent s'y aventurer, ce lac couvert d’icebergs qui atteint 200 mètres de profondeur à certains endroits, ce volcan dont la dernière éruption, en 2000, a duré 11 jours, ces rideaux de pluie obscurcissant un panorama digne du Seigneur des Anneaux - désert de cendre noire et de rochers, petites rivières, glaciers, fumerolles, montagnes marrons, orangées et bleutées. J’en ai encore des frissons.



Dans des conditions aussi difficiles – il arrive que des touristes frôlent la mort voire trépassent sur le parcours que nous avons suivi -, une espèce de lien, de solidarité implicite se tissent souvent entre les randonneurs, unis dans l’adversité. Quand j’ai été contraint de m'allonger deux fois pour me protéger de la puissance inouïe du vent, quand de petits grêlons mêlés à de minuscules cailloux m’ont fouetté la peau et les vêtements, quand j’ai remonté une pente atroce sur un chemin glacé, je n’ai jamais été seul. J’ai régulièrement pensé au roman La Horde du Contrevent, incontournable chef-d’œuvre déjà évoqué sur ce blog. A ce passage, par exemple :
Sitôt qu’Arval sortait du Pack, je me retrouvais insuffisamment abritée, par intervalles soumise au plein vent. J’avais froid, cette impression, que je dispersais mal, d’être progressivement percée à nu et faufilée dans mes fibres. Mon pantalon faseyait aux mollets, le tissu tirait aux manches et au cou, jamais assez épais à cette vitesse, assez opaque. J’enviais les buissons, l’espace qu’ils s’aménageaient entre les branches pour laisser passer les gros flocons d’air… Depuis que j’étais petite, souvent le même rêve idiot : j’aurais voulu devenir, à ces moments, une haie de buis, pas cette voile de peau en travers du flux, ce tronc à plat sans même de racines aux pieds, pour s’associer à la terre…

Dans la ravine, la pluie si redoutée arriva d’un coup. Des billes d’eau éclatantes sur mon front, qui faisaient des ronds sombres dans mon maillot bleu… Et aussitôt l’averse vira au déluge, les gouttes devinrent si denses, et si puissant le vent, que je restai plusieurs secondes sur place comme un caillou ripant au fond d’une rivière en crue. Je reculais, la peur de décrocher au ventre…
— Rivek Dar, Arval !

Sur un appel de Golgoth, Arval rejoignit le Pack, je baissai la tête, tout le monde s’était resserré d’un seul coup, sans cris ni concertation, un réflexe animal de harde instinctive. On ne s’en sortirait pas seul, personne, pas même le Goth, on n’était qu’un petit tas de chair frêle en mouvement, soudés un bloc, désunis presque rien, à peine un billot de bois craquelé prêt à fendre sous la rafale, de la sciure à souffler à la bouche. Et tout le monde le savait, Pietro et Sov plus que tous les autres qui contraient une belle moitié du temps carrément dos à la pluie, tournés face à nous, pour mieux chaîner du geste et de la voix le Fer — le Fer au Pack, le Bloc aux crocs —, rien qu’avec des regards parfois, quelques mots de placement, de cadence ou d’amour.
« Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation », affirmait Debord dans la Société du Spectacle. La phrase est aussi péremptoire et contestable que peut l’être un aphorisme, mais elle m’est fréquemment venue en tête en Islande, où ce qui est « directement vécu » atteint un degré ultime de compacité, d’acuité et d’ineffabilité. Le plus ironique étant que mon appareil photo, capable de filmer des vidéos en haute définition, capturait bien plus fidèlement la réalité que mes yeux légèrement myopes. J’ai même quasiment redécouvert l’Islande en sélectionnant les photos et en montant le clip. Le réel plus fort que la représentation, la représentation qui dévoile le réel : c’est sur cette idée très hitchcockienne (Fenêtre sur Cour) ou de palmienne (la majorité de son oeuvre) que je conclus ces divagations.

lundi 20 juillet 2009

VOYAGE : MONTREAL ET NEW YORK

Des balades dangereuses, des panoramas vertigineux, des restaurants miam, des concerts de jazz, des acrobates en bateau, des sphères géantes pour hamster de 76 mètres de diamètre, des écureuils SDF, des sculptures monumentales, des faits divers terrifiants, des couchers de soleil américains, un loft gigantesque, un film de science-fiction minimaliste, l'atelier de Francis Bacon... Récit en images et en textes d'un mémorable voyage à Montréal, entrecoupé d'un retour à New York, un an après ma première visite.

vendredi 12 juin 2009

RENAISSANCES



Quand on délaisse temporairement un blog, c'est généralement pour de bonnes raisons : militer pour l'association de défense des sans-papiers Droits Devant !!, se réjouir de ses récents succès et appeler par ailleurs tous nos amis spongieux à la soutenir humainement et financièrement (voir la fin de cette page) ;

Suivre les aventures adorables, drôles et admirablement bien racontées de deux dents de lait sur un très beau blog photo ;

Ecouter le rock sinueux des Joggers ou le monstrueux dernier album de Dream Theater : 75 minutes et six morceaux aussi variés que consistants, dont cinq excellents (la preuve avec The Shattered Fortress, medley de folie qui synthétise quatre de leurs précédentes chansons) ;

Répondre aux lecteurs de Jeux Vidéo Magazine sur divers sujets : Violence et jeu vidéo : l'auto-critique ; Comment devenir créateur de jeu ? ; Le grand public va-t-il tuer le jeu vidéo ? ; Comment devenir journaliste ? ; Jeu vidéo et dépression ; La fin du jeu en solo ? ; Le jeu vidéo peut-il faire le bien ?... ;

Recommencer Final Fantasy VII (disponible depuis peu sur la boutique en ligne de la PlayStation 3) le week-end des élections et de la diffusion de Home, s'amuser que le jeu mette en scène des éco-terroristes et se souvenir de sa fin magnifique, sans doute prophétique... ;

Voir Welcome, fiction sur la condition des réfugiés et sur ceux qui les aident. Se dire qu'il s'agit avant tout d'un très bon film, sec, tendu, à la dramaturgie et à la mise en scène puissantes (superbement cadrées, les séquences de traversée de la Manche possèdent un vrai souffle). En conclure que c'est une sorte de version contemporaine d'un chef-d'oeuvre du cinéma d'anticipation : Les Fils de l'homme (même thème central, héros assez proches) ;


Découvrir enfin Terminator Renaissance. Louer sa mise en scène ambitieuse et élégante (dont les plans-séquences immersifs évoquent justement Les fils de l'homme), ses scènes d'action spectaculaires et lisibles, sa splendide photo cendreuse et désaturée, ses influences pertinentes (Mad Max II, La Route...). Frissonner devant le personnage de Marcus, très beau et bien écrit (background, relations avec les autres protagonistes, rôle dans l'intrigue, évolution, dialogues). Regretter les 30 minutes de scènes coupées. Et se dire que, malgré quelques rôles secondaires inutiles, des incohérences gênantes, une fin décevante et une bande-originale médiocre, McG signe un excellent film, gorgé de détails et d'idées (vivement un director's cut en DVD, pour l'instant hypothétique) ;

Regarder l'excellente "version interminable" (six heures !) de Dieu seul me voit. S'émerveiller de l'inventivité de la mise en scène ou du burlesque des situations. Rire de l'indécision et de l'incapacité à s'engager (sentimentalement, politiquement) d'Albert Jeanjean. Et retenir cette réplique, prononcée par Jeanne Balibar qui vient de lancer un verre d'eau à la figure d'Albert sans aucune raison : "Un acte libre est quelque chose d'absolument neuf, hors de notre histoire" ;

Se délecter de Tout ce que le ciel permet de Douglas Sirk, mélodrame d'une absolue perfection sur l'amour, le conformisme, la liberté et la pression sociale, et se demander quels cinéastes, aujourd'hui, savent aussi bien utiliser la lumière et la musique pour exprimer les émotions des personnages ;

Approuver Noël Burch lorsque, dans un livre remarquable et très documenté
, il assassine l'élitisme, le formalisme et la misogynie dont font preuve de nombreux films, critiques et cinéphiles. Admirer la rigueur et la finesse avec lesquelles il analyse des oeuvres qu'il estime, de La Garce à Blue Steel en passant par Mary à tout prix ou Showgirls -pour en savoir plus, lire ce billet en deux parties (1, 2) et cet article ;

Attendre l'été, les vacances, Montréal, New York et l'Islande. Et promettre à son Eponge domestique qu'on ne l'abandonnera pas trop longtemps.

IDEES : VIVRE L'UTOPIE

Visible entièrement sur Google Vidéo, le très beau documentaire Vivre l'utopie relate l'histoire de l'anarchisme espagnol et notamment celle de la révolution libertaire de 1936-1938, suivie par des millions de personnes (les passionnants détails de cette expérience autogestionnaire sont exposés à partir de 45 mns 15). Une trentaine d’anciens militants anarchistes y racontent la mise en pratique de leurs idéaux en Catalogne et en Aragon. Entre cette période, la Commune, les LIP en 1973 ou les réappropriations d'entreprises en Argentine depuis 2001, l'"utopie" n'en a pas toujours été une... Souvenons-nous en. Extraits des témoignages contenus dans le film :
"Je ne fais pas partie de ceux qui disent qu'il n'y a pas eu de querelles ou d'autres choses, mais l'ensemble de ce que fut le communisme libertaire, c'est l'unique solution qu'a l'humanité pour pouvoir bien vivre, il n'y a pas d'autre forme. On a démontré qu'il n'y avait pas besoin de guardia civile, de riches, de prêtres pour bien vivre. Ils sont les seuls qui paralysent la progression de la richesse (sourire). Car la seule richesse qui existe, c'est le travail".

"Quand les propriétaires de l'usine sont rentrés [à l'arrivée du franquisme], ils l'ont trouvée en bien meilleur état qu'ils ne l'avaient laissé, et la production avait doublé"

vendredi 1 mai 2009

IDEES : LE PREMIER MAI



Qui se souvient encore de la signification du Premier Mai ? Il s'agit pourtant d'une date importante pour le mouvement ouvrier, et notamment pour l'anarchisme.
Nous sommes en 1886, à Chicago. Dans cette ville, comme dans tout le pays, le mouvement ouvrier est particulièrement riche, vivant, actif. A Chicago, les anarchistes sont solidement implantés. Des quotidiens libertaires paraissent même dans les différentes langues des communautés immigrées. Cette année-là, le plus célèbre d'entre eux, le Arbeiter Zeitung, tire à plus de 25 000 exemplaires alors que le mouvement ouvrier combat pour la journée de huit heures. Les anarchistes y sont engagés (...). Le mot d'ordre de grève générale du 1er mai 1886 est abondamment suivi, tout particulièrement à Chicago.

Ce jour-là, August Spies, militant anarchiste bien connu de la Ville des Vents, est un des derniers à prendre la parole devant la foule imposante des manifestants. Au moment où ceux-ci se dispersent, la manifestation, jusque là pacifique, tourne au drame : deux cents policiers font irruption et chargent les ouvriers. Il y aura un mort et une dizaine de blessés. Spies file au Arbeiter Zeitung et rédige un appel à un rassemblement de protestation contre la violence policière. Il se tient le 4 mai, au Haymarket Square de Chicago.
Le rassemblement commence dans le calme. Mais soudain, des policiers foncent vers la foule. Une bombe est lancée sur eux, faisant un mort et des dizaines de blessés. Les policiers ouvrent alors le feu, tuant un nombre indéterminé de personnes. Huit anarchistes, dont Spies, sont jugés, alors que seuls trois d'entre eux étaient présents le 4 mai. Le procureur fait de leur procès celui de l'anarchisme :

"Il n'y a qu'un pas de la république à l'anarchie. Ces huit hommes ont été choisis parce qu'ils sont des meneurs. Ils ne sont pas plus coupables que les milliers de personnes qui les suivent. Messieurs du jury : condamnez ces hommes, faites d'eux un exemple, faites-les pendre et vous sauverez nos institutions et notre société"
Tous les accusés, sauf un, seront condamnés à mort, sans preuves, par un jury haïssant les anarchistes. L'un d'eux se suicide dans sa cellule, trois voient leur peine commuée en prison à vie et quatre sont pendus.
Ce sont eux que l'histoire évoque comme les "martyrs du Haymarket". Plus d'un demi-million de personnes se pressent à leurs funérailles. Pour ne pas oublier ce drame, le 1er mai est décrété jour de commémoration. Neebe, Schwab et Fielden seront libérés le 26 juin 1893, leur innocence étant reconnue ainsi que le fait qu'ils ont été victimes d'une campagne d'hystérie et d'un procès biaisé et partial. Ce qui reste clair cependant, ce sont les intentions de ceux qui condamnèrent les martyrs de Chicago : briser le mouvement ouvrier et tuer le mouvement anarchiste aux Etats-Unis.
(les citations sont extraites de l'Ordre moins le pouvoir, de Normand Baillargeon. Cet excellent petit livre sur l'anarchisme, extrêmement clair et synthétique, en détaille les racines, les figures principales, les événements historiques, les positions -économie, syndicalisme, écologie, éducation, médias, éthique, féminisme-, et comprend une abondante bibliographie)

MUSIQUE : BRIC A BRAC


Le rock-world-pop-folk psychédélique, inclassable, foisonnant et très riche en textures d'Animal Collective ; le piano et les cordes omniprésentes d'Antony and the Johnsons, supergroupe mené par un chanteur à la tessiture incroyable ; l'electro-rock doux-amer et feutré du duo Metal Hearts ; la musique agressive, polyrythmique, étrange et avant-gardiste de Meshuggah : nouvelle compilation 100% spongieuse, à déguster sur place ou à emporter.

ANIMAL COLLECTIVE
> Fireworks

> Did You See the Word

> My Girls

> Also Frightened

> The Purple Bottle

> Tikwid

> Grass


ANTONY AND THE JOHNSONS
> My Lady Story

> Man is the Baby

> Twilight


METAL HEARTS
> Disappeared

> Midnight's Sun

> Socialize

> Ocean Song


MESHUGGAH
> In Death - Is Life

> In Death - Is Death

lundi 30 mars 2009

JEU VIDEO : LE GUIDE "METIERS ET CREATEURS DU JEU VIDEO"

Enfin. Après plusieurs mois de travail, et en attendant une deuxième édition qui sera plus riche en contenu, le guide "Métiers et créateurs du jeu vidéo", dont je suis le co-auteur, est disponible sur notre site et sur celui de la Fnac. En exclusivité, voici un extrait de l'interview de Warren Spector (producteur d'Ultima Underworld, Thief, Deus Ex...) incluse dans le guide :
Vous avez étudié les théories et l’histoire du cinéma. Voyez-vous des parallèles entre l’histoire du cinéma et celle du jeu vidéo ?
Je pense que la structure de notre industrie est effectivement comparable à celle du cinéma dans les années 1920 à 1940. Il y avait une poignée de cinéastes indépendants à l’époque, tout comme il y a une poignée de créateurs de jeux indépendants. Il y avait un mouvement expérimental marginalisé et pas très influent, et c’est le cas des jeux indépendants aujourd’hui.La plupart des films étaient fabriqués par des employés à plein temps, présents à tous les niveaux de la hiérarchie et dans toutes les disciplines : ce modèle de création en interne domine également l’industrie moderne du jeu vidéo.

Les jeux vidéo se situent-ils à l’âge d’or des studios ?
C’est un autre débat : laissons ça aux historiens. Pour l’essentiel, j’espère que nous continuerons à suivre les traces de l’industrie du cinéma. Je souhaite voir les éditeurs fonctionner comme des distributeurs – et, dans certains cas, comme des sources de financement – pour des créateurs largement indépendants. Mais je pense que cela n’arrivera pas avant plusieurs années. Il y a surtout un point sur lequel j’aimerais voir le jeu vidéo se rapprocher du modèle classique d’Hollywood : à l’époque, la diversité des sujets, des genres et des styles était gigantesque et il y avait des tonnes de scénaristes, réalisateurs, chefs-opérateurs... très singuliers. Je ne vois pas cette variété dans les jeux d’aujourd’hui.
Profitant d'un léger moment de répit, j'ai également consacré un long papier à Mother 3, publié dernièrement sur Chronic'art.com. "Tant qu'existeront des titres comme celui-là, les jeux vidéo ne seront jamais tout à fait une perte de temps"... Mother 3 mérite votre attention. Jouez-y ! (instructions à la fin de ce billet)

jeudi 26 février 2009

LIVRE : LA ROUTE



Un homme, un enfant, un caddie et une Amérique cendreuse : La Route (The Road en VO) est un roman post-apocalyptique aussi court que dépouillé. Les phrases et paragraphes brefs et elliptiques, l'intrigue se concentrant sur la survie des personnages au quotidien (trouver de la nourriture, un refuge, un chemin), l'absence d'explication donnée à la fin du monde, le style minimaliste permettent aux souvenirs et à l'imagination du lecteur de s'engouffrer dans le récit et installent un rythme singulier. Par contraste avec la sobriété globale de l'écriture, chaque jaillissement d'horreur ou de poésie, chaque métaphore ou flashback, chaque scène d'action acquièrent une puissance dévastatrice.

La Route sera adapté au cinéma cette année, avec Viggo Mortensen dans le rôle principal. On peut s'interroger sur l'intérêt créatif de la démarche : la beauté, l'originalité et la force du livre doivent tout à l'écriture très particulière de Cormac McCarthy -écrivain très populaire aux Etats-Unis, auteur du livre dont est tiré No Country for Old Men et récompensé du prix Pulitzer pour La Route.

Dans tous les cas, amis spongieux, lisez ce roman maintenant, avant que le film n'en pollue votre représentation mentale. Ce grand bouquin a déjà influencé les auteurs de Fallout 3 et Terminator : Salvation. Evocateur et bouleversant, il nous rappelle que ni les hommes, ni la société ne sont éternels. En ces temps incertains, on peut y trouver une énergie supplémentaire pour se dépêcher de vivre et d'agir.

lundi 16 février 2009

JEU VIDEO : FLOWER


(making-of à regarder de préférence après avoir terminé le jeu)

A la fin du film Princesse Mononoké*, une vague de végétation luxuriante provoquée par la mort du Dieu-Cerf s'abat sur le monde et le recouvre à toute vitesse. Imaginez maintenant que vous êtes cette vague. D'abord simple pétale porté par le vent, vous devenez comète à mesure que des fleurs se greffent à vous. Sur votre chemin, le monde se régénère, l'herbe renaît, se courbe et bruisse, les couleurs se ravivent et la nature se venge de la civilisation. C'est cette expérience unique que procure Flower, "poème vidéoludique" muet aussi court que flamboyant, disponible depuis peu sur la boutique en ligne de la PlayStation 3.

D'une qualité de finition impressionnante, Flower conjugue l'esprit d'un jeu vidéo indépendant avec les moyens importants d'une production interne de Sony. A l'instar d'Okami, il valorise l'action la plus banale que peut proposer un jeu vidéo -traverser un univers- à la faveur d'effets visuels et sonores enchanteurs. Plus généralement, il adapte ses mécanismes aux émotions sereines qu'il souhaite susciter : aucun game over, un challenge presque absent, un système de contrôle très simple et intuitif (l'agrégat de pétales se dirige en inclinant la manette et en pressant n'importe quel bouton pour accélérer). Pour autant, il s'agit d'un vrai jeu : plus l'on maîtrise son avatar, plus les parties gagnent en fluidité et grisent les sens jusqu'à générer un sentiment d'euphorie d'une intensité rare.

En dire davantage sur ce micro chef-d'oeuvre de deux heures, moelleux et épuré, serait criminel. Destiné aux amoureux du jeu vidéo "moderne" (c'est-à-dire guidé par l'émotion, le sens, l'histoire à transmettre) mais pas seulement, Flower est la plus belle surprise de ce début d'année.

*
Sommet du cinéma épique et meilleur film de Miyazaki avec Mon Voisin Totoro, comme le savent déjà nos amis spongieux ^^

CINE : BURN AFTER READING



Deux employés d'un club de remise en forme (Frances McDormand, Brad Pitt) trouvent par hasard des documents appartenant à un ex agent de la CIA (John Malkovich). Ils décident de le faire chanter en lui échangeant contre une rançon... Après No Country for Old Men, les frères Coen reviennent avec un film en apparence plus léger mais peut-être bien plus désespéré. Volontairement surjoués, tous les personnages se révèlent stupides ou d'un cynisme ahurissant (les agents de la CIA). Le film se moque de la gueule de tout le monde, mais la plupart des protagonistes possèdent suffisamment de motivations pour susciter l'empathie. On a même régulièrement envie de pleurer avec eux, de plaindre leur peur de vieillir, leur besoin de reconnaissance ou leur incapacité à exprimer ce qu'ils ressentent.

Plutôt cérébral, l'humour de Burn after Reading ne procède pas tant par gros gags que par accumulation : c'est surtout dans la deuxième moitié du film qu'on se décroche la mâchoire, quand les événements prennent des proportions grotesques, quand les trajectoires des personnages finissent par s'entrechoquer pour aboutir à d'énormes quiproquos aux conséquences terribles (l'hilarante scène de la hâche). De ce point de vue, le scénario adopte une structure proche d'un épisode de Seinfeld. Sauf qu'ici, on rit jaune : Burn after Reading est une tragicomédie sur l'"idiotie de l'époque", comme le dit Malkovich dans un dialogue mémorable.

mercredi 24 décembre 2008

LES EPONGES D'OR 2008



EPONGE D'OR JEU VIDEO : MOTHER 3, UN RPG DE GAUCHE FOUFOU SUR GAME BOY ADVANCE


Eh oui, le meilleur jeu de 2008 date de 2006, ne paie pas de mine et concerne une console portable sortie en 2001 ! Disponible uniquement en version japonaise jusqu'à présent, Mother 3 vient enfin d'être traduit en anglais par une talentueuse équipe de fans (lire cette interview de l'un d'entre eux)*. Il était temps : c'est un chef-d'oeuvre du jeu de rôle, un sommet du jeu vidéo narratif, et sans doute le titre le plus significatif édité par Nintendo depuis The Legend of Zelda : Majora's Mask.

Mother 3, c'est une histoire tragique et extravagante, individuelle et collective, grave et hilarante, épique et familiale, poétique et politique, chorale et déployée dans le temps. C'est un tempo, une variété, une inventivité irrésistibles. C'est un système de combat et d'inventaire impeccablement équilibré, qui évite les traditionnels affrontements aléatoires et ne manque pas de subtilité. C'est une bande-son entêtante et éclectique qui compte pas moins de 200 morceaux (!), dont un thème principal aux déclinaisons bouleversantes. C'est une oeuvre d'auteur où les mécanismes de jeu eux-mêmes expriment parfois des émotions et des idées. C'est un graphisme 2D d'une beauté rare : les détails soigneusement choisis, l'invraisemblable naturel des animations, l'intelligence de la mise en scène (au sens théâtral et cinématographique) construisent un monde palpable, chargé d'histoire et de sens.

Mother 3, c'est surtout une justesse impressionnante, des dialogues capables de nouer l'estomac, des thèmes sérieux évoqués de manière simple, forte et souvent visuelle (les conséquences de l'apparition de l'argent, l'acceptation de la mort -la sienne et celle des autres...). Mother 3, c'est un grand RPG de gauche (son créateur, Shigesato Itoi, est un ancien militant marxiste-léniniste), humain, délirant, foisonnant. Vingt-cinq heures plus indispensables que tous les jeux haute-définition à 70€ commercialisés cette année.

* Pour jouer à Mother 3, utilisez cet émulateur, ce patch de traduction et une copie du jeu, facile à trouver sur le Net. Bien sûr, vous devez posséder la cartouche originale, sinon il s'agit de piratage.




EPONGE D'OR SERIE : THE WIRE, UNE GRANDE FICTION POLICIERE ET SOCIALE

Unanimement saluée par la critique comme l'une des plus ambitieuses séries jamais tournées, The Wire se situe dans la grande ville américaine de Baltimore, dont elle analyse les rouages sociaux et politiques. Chacune des cinq saisons montre un aspect de la ville (le trafic de drogue, le port, la bureaucratie, le système scolaire, les journaux) et prend la forme d'une dizaine d'épisodes d'une heure. La série octroie une importance égale à tous les points de vue : dans la première saison par exemple, la caméra suit autant l'enquête policière que le quotidien des dealers.

Une anecdote permet de mesurer le degré de documentation et de connaissance du terrain sur lequel s'appuie la série. Les flics ou dealers qui croisent les acteurs leur disent systématiquement : "Vous êtes les premiers à montrer comment ça se passe vraiment. Tous les personnages, on les connaît". Pas étonnant : le créateur de The Wire, David Simon, est un ex journaliste spécialiste des affaires criminelles. Quant à Ed Burns, l'un des scénaristes et producteurs, il s'agit d'un ancien flic et professeur.

A la fois extrêmement accrocheuse, réaliste et humaniste, The Wire, contrairement à la majorité des fictions policières, s'affiche clairement à gauche (décidément) : elle s'intéresse d'abord à l'influence des institutions, du milieu social ou de la famille sur les individus et décrit des personnages tout en nuances, qu'ils soient flics ou voyous.

Un coffret contenant l'intégrale de la série vient de sortir en Angleterre (DVD Zone 2) et aux Etats-Unis (Zone 1) : l'occasion de découvrir ce monument, qualifié de "meilleur show télé de tous les temps" par Alan Moore (l'immense auteur de Watchmen et From Hell) et Barack Obama lui-même... La politique du nouveau président s'attaquera-t-elle aux désastres sociaux dont témoigne la série ? On peut en douter. Mais il ne pourra pas dire qu'il ne savait pas. Vous non plus.




EPONGES D'OR CINEMA, EX AEQUO : A BORD DU DARJEELING LIMITED, NO COUNTRY FOR OLD MEN, HELLBOY II

Vous savez déjà tout le bien que pense l'Eponge du plus beau Wes Anderson, du plus grand Coen Bros. et du plus généreux Del Toro : inutile d'en ajouter.




EPONGE D'OR MUSIQUE : DEERHOOF, OFFEND MAGGIE

A la fois pop et torturé, accrocheur et avant-gardiste, Offend Maggie synthétise la musique de Deerhoof et constitue, avec The Runners Four, le meilleur album de ces gentils maboules. Deerhoof, quoi qu'où qu'est-ce ? Des mélodies douces ou dissonantes, des rythmiques, arrangements et constructions souvent singuliers, une chanteuse jap à la voix enfantine... Hop, p'tite compil maison pour nos amis spongieux. Les plus pressés (ou paresseux, ou dubitatifs) peuvent écouter les morceaux ci-dessous :

> Wrong Time Capsule

> Lemon & Little Lemon

> Eaguru Guru

> Chandelier Searlight

> The Galaxist

> Milk Man

> Choco Fight

> Desaparecere

> My Purple Past

mercredi 10 décembre 2008

CINE : TERMINATOR : SALVATION



Après un teaser diffusé en juillet dernier, la première bande-annonce de Terminator : Salvation vient enfin d'être dévoilée il y a quelques heures. Le film se déroule entièrement après le fameux Jugement Dernier et raconte les premières années de la guerre contre les machines, avant la conception du T-800 (le modèle incarné par Schwarzenegger dans les trois premiers films).

La bande-annonce montre une partie des éléments que greffe le film à la mythologie Terminator : Marcus Wright, un mystérieux personnage amnésique dont le dernier souvenir est sa condamnation à mort (et que Connor soupçonne d'être un T-800, d'après le trailer) ; le T-600, plus imposant et lent que le T-800 et pourvu d'une mitrailleuse lourde ; des motos Terminators ; des camps de prisonniers que Skynet utilise pour étudier les humains ; et surtout un Terminator géant d'une quinzaine de mètres qu'on croirait sorti d'un dessin animé japonais !

McG, connu pour... Charlie et ses drôles de dames, réalise le film. Difficile, dès lors, de ne pas douter du projet... sauf que le bonhomme semble sincèrement passionné par son sujet, et assisté par des collaborateurs de premier ordre : le légendaire Stan Winston a travaillé sur le design et les effets spéciaux des créatures avant de mourir, Conrad Buff (Terminator 2, yeah !) se charge du montage, et le charismatique Christian Bale incarne John Connor.

McG affirme avoir privilégié l'histoire et les personnages, et perfectionné quotidiennement le scénario avec Bale lors du tournage. Il souhaite créer un long-métrage d'"une grande ampleur mais possédant les nuances et le sous-texte d'un film indépendant de haute qualité"... Ce qui constitue une manière compliquée de dire qu'il s'agira d'un bon film, fidèle aux qualités des précédents. Rappelons en effet que des thèmes puissants (libre-arbitre, auto-destruction de l'humanité, holocauste nucléaire...) ont toujours innervé la saga et que les trois premiers Terminator sont des films indépendants (on pourrait ajouter que l'étiquette "indépendant" a perdu de son sens depuis que les majors ont établi leurs propres filiales pseudo-"indépendantes", mais passons).

En tout cas, la bande-annonce suggère une mise en scène assurée, ne cédant pas au surdécoupage et aux effets "capturé sur le vif" exagérés qui affligent certains blockbusters hollywoodiens : plans assez longs, caméra mobile sans être perpétuellement tremblotante... Espérons toutefois que le classement PG-13 que vise le film ne nuise pas à sa rugosité, les précédents Terminator étant classés R. McG défend ce choix en citant Batman Begins, un autre PG-13 filmé selon lui "sans compromis" (un argument valable) et prétend que le film "passe en premier" et sera "protégé à chaque instant".

En attendant la sortie française de Terminator : Salvation en juin 2009, nous patienterons grâce à la série The Sarah Connor Chronicles, qui a dépassé nos plus fous espoirs spongieux. Tous les thèmes pressentis dès le pilote (notamment le processus d'apprentissage des machines au contact des humains) s'avèrent exploités avec une intelligence épatante.

Les pistes et enjeux se multiplient, les personnages se révèlent bien plus complexes qu'il n'y paraît, les dialogues sont tranchants, les scénaristes savent manifestement où ils vont (selon l'acteur principal, ils ont déjà défini l'intrigue globale des cinq premières saisons !) et, fait trop rare dans une série télé, la mise en scène offre parfois de vraies idées de cinéma (un long plan filmé depuis le fond d'une piscine où un Terminator jette un à un les corps des policiers qui l'attaquent). Evidemment, des scènes ou épisodes faibles voire ridicules subsistent, mais le niveau de qualité global surprend.

Malheureusement, les chiffres d'audience décevants risquent d'entraîner l'annulation du show après la fin de la seconde saison, actuellement diffusée aux Etats-Unis et téléchargeable en VO sous-titrée en français aux adresses habituelles. Quoi qu'il en soit, aucun amateur de Terminator digne de ce nom ne peut snober cette série remarquable.