mercredi 21 octobre 2009

ACTUALITE : LA LUTTE DES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS (2)



Alors que les actions des travailleurs sans papiers prennent de l'ampleur (3 000 grévistes dans une quarantaine d'entreprises aux dernières nouvelles), un rassemblement a été organisé vendredi 16 octobre devant le consulat d’Haïti à Paris. La vidéo spongieuse ci-dessus en résume les enjeux, tandis que ce texte détaille le bilan de la rencontre avec le ministre conseiller.

jeudi 15 octobre 2009

ACTUALITE : LA LUTTE DES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS



Depuis l'année dernière, la lutte pour la régularisation des travailleurs sans-papiers s'accélère. Elle semble avoir pris un tournant le samedi 10 octobre, avec une manifestation qui a réuni plus de 10.000 personnes - du jamais vu depuis 1997. Dans la foulée, le lundi 12 octobre, 1.300 travailleurs sans-papiers ont lancé un nouveau mouvement de grève dans 28 entreprises, organisé par la CGT. D'autres actions se préparent, qui seront annoncées, entre autres, sur le site de l'association Droits devant. La première d'entre elles a lieu dès demain, devant le consulat d'Haïti. En attendant, regardez donc la vidéo haute définition ci-dessus, signée l'Eponge. Elle montre des images du cortège de samedi, accompagnées de propos édifiants de sans-papiers qui témoignent de leur vie. A diffuser.

JEU VIDEO : LE GUIDE "200 JEUX VIDEO ESSENTIELS"

Enfin ! Après des mois de dur labeur, le guide « 200 jeux vidéo essentiels », dont je suis le rédacteur en chef, sort aujourd’hui en kiosques et sur notre site. Au programme, une ludothèque idéale constituée de jeux disponibles dans le commerce, sélectionnés par un comité de dix journalistes de la presse écrite, du Web, de la radio et de la télévision.

En bonus : l’histoire du jeu vidéo, un panorama des métiers de la création, des conseils pour choisir sa machine, des rétrospectives sur des sagas de légende, des portraits d’auteurs exceptionnels, les 10 meilleurs titres indépendants, les 10 plus grands jeux en ligne, les 10 hits les plus attendus de 2010, une préface de David Cage, des index par genre et par support ainsi qu’un lexique. En exclusivité, voici un extrait de l’article consacré à la série Metal Gear et à son créateur, Hideo Kojima :
Pendant son enfance, Hideo Kojima a voulu être cosmonaute, policier, détective, artiste, illustrateur, écrivain, réalisateur... Enthousiasmé par Super Mario Bros., il devient game designer. Il entre en 1986 chez Konami où il codirige Penguin Adventure. En 1987, il conçoit Metal Gear. En 1988, il rend hommage au cinéma –son autre passion - dans The Snatcher, un jeu d’aventure cyberpunk fortement influencé par Terminator et Blade Runner. Après Metal Gear 2, il lance Policenauts en 1994, un jeu d’aventure mêlant science-fiction et film noir. Il séduit ensuite un public massif et mondial avec les quatre Metal Gear Solid. Marqué par les récits de son père qui a connu les bombardements sur Tokyo pendant la Seconde Guerre mondiale, Kojima injecte dans cette série son obsession du nucléaire et son pacifisme. Il dirige aujourd'hui Kojima Productions, une filiale de Konami fondée en 2005.

VOYAGE : L'ISLANDE



L'Islande… Jusqu'à présent, le voyage de ma vie. Extraterrestre. Hors de proportion. FOU. C'est le début des temps, ou la fin des temps, ou l'Enfer, ou la Lune, mais ce n'est plus tout à fait notre planète. D'ailleurs, si vous voulez apprendre comment une monstrueuse éruption volcanique a produit une sorte d’apocalypse mondiale il y a deux siècles et contribué à déclencher la Révolution française, lisez donc ce compte-rendu en images, souvent spectaculaires. Pour le reste, la vidéo ci-dessus concentre en cinq minutes les moments forts du voyage. A regarder de préférence en haute résolution et en plein écran.

Choc sensoriel, donc, mais qui n'est pas sans donner matière à réfléchir. En traversant ces paysages à la beauté, à la diversité et aux contrastes insensés, qu'on croirait dessinés par un artiste dément, je n'ai pu m'empêcher de penser aux jeux vidéo et à ce que j'ai recherché à travers eux depuis que je suis petit : un mystère ; un voyage facile dans des lieux irréels qui se dévoilent peu à peu ; une fascination panthéiste pour une nature pastorale, angoissante ou sublime (au sens de Burke). On sait que Shigeru Miyamoto, le créateur de Super Mario et The Legend of Zelda, aspire à transcrire dans ses jeux des sensations précieuses : celles qui l'habitaient quand, enfant, il découvrait des grottes ou d'étroits chemins dans les forêts de sa campagne natale. Et des titres aussi divers que Half-Life 2, Halo, Ico, Shadow of the Colossus, Silent Hill 2, Grand Theft Auto IV, Uncharted : Drake’s Fortune ou Psychonauts façonnent des mondes inoubliables, qui portent les traces d’un long passé, écrasent le joueur sous des perspectives monumentales ou utilisent l'espace comme une métaphore de l'esprit.

Je n'avais pas encore visité un pays capable de me procurer des émotions comparables. Et puis j'ai vu cette immense chaîne de cratères menant à un glacier de la taille de la Corse, ces nuages bas se déchirer en pleine tempête pour révéler le ciel bleu pendant une poignée de secondes, cette nature si hostile que pas un insecte, pas un animal ne peuvent s'y aventurer, ce lac couvert d’icebergs qui atteint 200 mètres de profondeur à certains endroits, ce volcan dont la dernière éruption, en 2000, a duré 11 jours, ces rideaux de pluie obscurcissant un panorama digne du Seigneur des Anneaux - désert de cendre noire et de rochers, petites rivières, glaciers, fumerolles, montagnes marrons, orangées et bleutées. J’en ai encore des frissons.



Dans des conditions aussi difficiles – il arrive que des touristes frôlent la mort voire trépassent sur le parcours que nous avons suivi -, une espèce de lien, de solidarité implicite se tissent souvent entre les randonneurs, unis dans l’adversité. Quand j’ai été contraint de m'allonger deux fois pour me protéger de la puissance inouïe du vent, quand de petits grêlons mêlés à de minuscules cailloux m’ont fouetté la peau et les vêtements, quand j’ai remonté une pente atroce sur un chemin glacé, je n’ai jamais été seul. J’ai régulièrement pensé au roman La Horde du Contrevent, incontournable chef-d’œuvre déjà évoqué sur ce blog. A ce passage, par exemple :
Sitôt qu’Arval sortait du Pack, je me retrouvais insuffisamment abritée, par intervalles soumise au plein vent. J’avais froid, cette impression, que je dispersais mal, d’être progressivement percée à nu et faufilée dans mes fibres. Mon pantalon faseyait aux mollets, le tissu tirait aux manches et au cou, jamais assez épais à cette vitesse, assez opaque. J’enviais les buissons, l’espace qu’ils s’aménageaient entre les branches pour laisser passer les gros flocons d’air… Depuis que j’étais petite, souvent le même rêve idiot : j’aurais voulu devenir, à ces moments, une haie de buis, pas cette voile de peau en travers du flux, ce tronc à plat sans même de racines aux pieds, pour s’associer à la terre…

Dans la ravine, la pluie si redoutée arriva d’un coup. Des billes d’eau éclatantes sur mon front, qui faisaient des ronds sombres dans mon maillot bleu… Et aussitôt l’averse vira au déluge, les gouttes devinrent si denses, et si puissant le vent, que je restai plusieurs secondes sur place comme un caillou ripant au fond d’une rivière en crue. Je reculais, la peur de décrocher au ventre…
— Rivek Dar, Arval !

Sur un appel de Golgoth, Arval rejoignit le Pack, je baissai la tête, tout le monde s’était resserré d’un seul coup, sans cris ni concertation, un réflexe animal de harde instinctive. On ne s’en sortirait pas seul, personne, pas même le Goth, on n’était qu’un petit tas de chair frêle en mouvement, soudés un bloc, désunis presque rien, à peine un billot de bois craquelé prêt à fendre sous la rafale, de la sciure à souffler à la bouche. Et tout le monde le savait, Pietro et Sov plus que tous les autres qui contraient une belle moitié du temps carrément dos à la pluie, tournés face à nous, pour mieux chaîner du geste et de la voix le Fer — le Fer au Pack, le Bloc aux crocs —, rien qu’avec des regards parfois, quelques mots de placement, de cadence ou d’amour.
« Tout ce qui était directement vécu s’est éloigné dans une représentation », affirmait Debord dans la Société du Spectacle. La phrase est aussi péremptoire et contestable que peut l’être un aphorisme, mais elle m’est fréquemment venue en tête en Islande, où ce qui est « directement vécu » atteint un degré ultime de compacité, d’acuité et d’ineffabilité. Le plus ironique étant que mon appareil photo, capable de filmer des vidéos en haute définition, capturait bien plus fidèlement la réalité que mes yeux légèrement myopes. J’ai même quasiment redécouvert l’Islande en sélectionnant les photos et en montant le clip. Le réel plus fort que la représentation, la représentation qui dévoile le réel : c’est sur cette idée très hitchcockienne (Fenêtre sur Cour) ou de palmienne (la majorité de son oeuvre) que je conclus ces divagations.