samedi 18 août 2007

JEU VIDEO : EDGE HORS-SERIE, THE 100 BEST VIDEOGAMES



Quel bel objet ! Cet énorme hors-série de Edge - le meilleur magazine de jeu vidéo du monde, et le plus respecté par le milieu - contient des textes présentant les "100 meilleurs jeux" désignés par les lecteurs, la rédaction et des professionnels (sont également inclus les précédents top 100 établis en 2000 et 2003 par Edge, le deuxième étant classé par genres selon une typologie précise, réfléchie et très stimulante). Le choix des jeux, bien sûr, est éminemment contestable. Mais qu'importe : la superbe iconographie (pixel-art, dessins, captures d'écran, montages...) et les articles d'un haut niveau global font de ce hors-série de 250 pages l'une des plus longues et flamboyantes déclarations d'amour au jeu vidéo que je connaisse. Quel plaisir de lire des textes aussi passionnés, analytiques, travaillés, bien écrits, informatifs et intelligents ! Edge est l'un des rares magazines à prendre au sérieux la critique de jeu vidéo, à expliquer de manière aussi éloquente la singularité et le pouvoir d'évocation extraordinaire des chefs-d'oeuvre du media. Aux sceptiques, je recommande la lecture de cette jolie critique de quatre pages de Super Mario World, issue du hors-série : partie 1, partie 2. Les autres pourront commander le volume ici.

SERIE : THE SARAH CONNOR CHRONICLES

Depuis quelques semaines, l'épisode pilote de la série de SF la plus attendue de 2008 est visible sur le Net : The Sarah Connor Chronicles n'est rien moins qu'une suite télévisuelle et alternative de l'immense Terminator 2. Alternative car l'histoire de l'excellent troisième épisode n'est pas prise en compte -et heureusement : dans T3, Sarah Connor est morte d'une leucémie, le jugement dernier est présenté comme inévitable et le nouvel enjeu, à la fin du film, n'est plus d'empêcher mais simplement de gagner la guerre contre les machines. Difficile d'écrire une série avec une conclusion aussi sombre et fermée.

Réalisé par David Nutter (un vétéran de X-Files, entre autres) et scénarisé par Josh Friedman (La Guerre des mondes de Spielberg, le Dahlia Noir de De Palma), ce pilote de 50 minutes s'ouvre sur un plan très Terminator : une route qui défile pendant que Sarah (jouée par Lena Headey, la superbe reine de 300) parle solennellement en voix off...
"Certains pensent qu'un enfant, dans le ventre de sa mère, partage ses rêves, son amour pour lui, ses espoirs pour son avenir. Est-ce que ça lui est conté en images pendant qu'il dort en elle ? Est-ce pour cela qu'il la cherche en ce premier instant, et pleure pour qu'elle le caresse ? Mais si vous saviez depuis qu'il était en vous ce que la vie lui réserve ? Qu'il serait pourchassé. Que son destin serait lié à celui de millions de gens. Que chaque moment de votre vie serait consacré à sa survie. Comprendrait-il pourquoi vous êtes si dure ? Pourquoi vous êtes si sévère ? Irait-il toujours vers vous si le seul rêve partagé avec lui était un cauchemar ?"
Percutant, ce monologue intérieur de Sarah résume la saga, donne le ton de la série (pas de doute : c'est du Terminator), esquisse ses enjeux et amène naturellement à une scène de cauchemar, très bien fichue, qui se conclue sur le meurtre de John par un Terminator, sur l'apocalypse nucléaire (voir la photo made in Blog l'éponge) puis sur un plan du robot tueur face caméra, tenant Sarah par la gorge. La suite du pilote déroule, avec beaucoup de talent et de moyens, quoique trop mécaniquement, des scènes, dialogues et situations déjà vues dans les trois films. Peu de nouveautés, donc, mais des pistes scénaristiques intéressantes, proches de T3, que le format série permettra d'explorer en profondeur : comment John ado grandit-il ? Comment devient-il LE John Connor ? Quelle vie mènent Sarah et John au quotidien ? Qui a perpétué le projet Skynet et comment le détruire ? Les Terminator sont-ils capables d'émotions humaines et complexes ? (un plan sur le Terminator protecteur semblant troublé par l'hostilité de Sarah paraît suggérer ce thème, qui avait partiellement gâché T2 mais dont on peut espérer qu'il soit abordé ici avec moins de miévrerie et de ridicule)

Bien que trop peu original, ce pilote rassure : le scénario enchaîne action et scènes intimistes avec un sens du rythme typique des Terminator, la réalisation, même si sans génie, s'avère très lisible et efficace, les effets spéciaux sont extrêmement réussis (impressionnante scène où un Terminator arrache brutalement chaque élément d'une grande porte blindée, avec une sensation de force, de masse très bien restituée), et les acteurs sont impeccables : Lena Headey incarne Sarah avec toute la dureté et la sensibilité qu'exigent le rôle, et Thomas Dekker (Heroes) interprète un John Connor très convaincant, épuisé et désorienté par sa vie de fugitif. On attend désormais avec impatience la suite de la série, qui devra composer avec un budget évidemment moindre que le pilote, et imposer sa propre lecture de la mythologie Terminator. Diffusion début 2008 aux Etats-Unis.

A noter que la version du pilote disponible sur le Net ne sera jamais diffusée : suite à la fusillade de Virginia Tech, des scènes décisives, où John est attaqué en plein cours par son professeur remplaçant qui s'avère être un Terminator, seront supprimées ou modifiées...

samedi 4 août 2007

CINE : RATATOUILLE



Pourquoi Ratatuetouille ?

- parce que le grand Brad Bird (Les Simpson, Le géant de fer, Les Indestructibles) réalise

- parce que le scénar est conçu comme une montre suisse (du pur Pixar)

- parce que c'est à crever de bonheur tellement c'est parfaitement rythmé

- parce que le sous-texte est intéressant : le héros est un rat, créature redoutée et rejetée, métaphore des minorités, des opprimés, des immigrés... En quittant son milieu social, il se retrouve coincé entre un nouveau statut qu'il n'arrive pas à faire reconnaître et des origines pauvres qu'il est tenté de renier, non sans culpabilité... Bourdieu aurait apprécié !

- parce que le film sait rendre convaincantes et drôles les idées les plus improbables sur papier - qui d'autre que Bird pourrait nous faire croire à un rat qui dirige précisément les gestes d'un apprenti cuisinier en lui tirant les cheveux, caché sous sa toge ?

- parce que la mise en scène est virtuose : pendant une dizaine de minutes, au début du film, des travellings incroyables suivent le héros, emporté à travers les canalisations par les eaux des égoûts, parcourant des plafonds d'appartements sous lesquels des tranches de vie se dévoilent, échappant à mille dangers dans un restaurant, découvrant les toits de Paris qui se déploient soudainement devant lui... Le héros court continuellement d'un endroit à un autre, les lieux et événements s'enchaînent, et cette fluidité jubilatoire, ce torrent de maestria happent irrésistiblement le spectateur. Comme si Brad Bird avait filmé la fusion ultime entre les meilleurs jeux de plate-forme et d'aventure, et les manèges les plus spectaculaires et narratifs.

- parce que c'est beau à en mourir. Le réalisme chatoyant des éclairages, des matières, des couleurs, les effets de mise au point... On est presque tenté de tendre les bras en espérant toucher l'univers du film.

Qui n'aime pas Ratatouille a donc un petit coeur froid, sec et rabougri.