lundi 19 mars 2007

CINE : ANGEL



Le dernier François Ozon est une drôle d'expérience de cinéma. Parmi les films que j'ai beaucoup aimés, Angel est peut-être le seul à n'avoir suscité chez moi aucune émotion liée aux enjeux narratifs et à l'identification aux personnages. Pas un seul instant je ne me suis vraiment senti concerné par ce qui arrive au personnage d'Angel (inspiré d'une romancière réelle), une jeune et iiiinsupportable "prodige" de l'écriture qui parvient à faire éditer ses livres et rencontre un succès foudroyant dans l'Angleterre du début du XXème siècle.

Là où le film m'a sidéré, c'est par sa capacité à transcrire, à la faveur d'une mise en scène ultra cohérente, calculée et maîtrisée, la vision du monde de son héroïne qui cherche constamment à magnifier sa vie en la réécrivant. Chaque élément oscille constamment entre le premier degré absolu d'un mélodrame classique hollywoodien, et une ironie, un surjeu, une facticité extrêmes qui s'approchent de la parodie sans jamais y tomber tout à fait. Comme son héroïne, le film semble conscient de la fausseté de ce qu'il raconte, tout en y croyant totalement. Dans la scène centrale du film, exemple parfait de cet équilibre permanent et signifiant entre sublime et ridicule, Angel demande l'homme qu'elle aime en mariage : à cet exact moment, alors que l'homme paraît résister et que l'on devine clairement les enjeux les plus noirs du reste du film (incompréhension, trahison...), un orage éclate - rires dans la salle -, puis l'homme accepte la demande, la pluie cesse et un superbe plan en mouvement dessine une légère contre-plongée pour saisir le couple pendant qu'il s'embrasse devant l'arc-en-ciel qui vient de se former.

Difficile de décrire précisément le vertige et la fascination que m'a souvent procuré ce film paradoxe. Message aux amoureux de comparaisons improbables : Angel est un froid croisement entre le néoclassicisme de Titanic et la réflexivité de Metal Gear Solid 2.

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